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Réemploi des matériaux de construction : des métiers en évolution au service d'une filière en émergence
Le réemploi (et la réutilisation) consiste à allonger la durée de vie d’un produit ou matériau sans lui apporter de transformation lourde (contrairement au recyclage où le produit passe par un retraitement). Une fois démonté, nettoyé, éventuellement modifié, le matériau ou produit va pouvoir être réemployé pour un usage identique ou réutilisé pour un usage détourné.
Le réemploi des matériaux de construction, s’il en est encore à ses débuts, est une démarche impliquant de nombreux acteurs allant du décideur (la maîtrise d’ouvrage) jusqu’au réemploi effectif des produits et matériaux. Entre les deux, les professionnels du diagnostic et les entreprises de déconstruction constituent chacun un maillon d’intervention essentiel participant à l’objectif final de prolonger la vie d’un matériau ou produit, plutôt que de s’en débarrasser.
Quels sont les métiers et compétences existants ou à faire évoluer pour aller vers plus de réemploi ? Des besoins de professionnalisation sont-ils repérés ? Un rapport réalisé par le Carif-Oref de Normandie vient éclairer ces questionnements. Le présent zoom en livre les principaux enseignements.
Un contexte légal et sociétal venant inciter au réemploi
46 millions de tonnes de déchets sont produits par an par le secteur du bâtiment : 90 % sont issus de la déconstruction et de la réhabilitation, seuls 48 à 64 % des déchets sont valorisés. Plus précisément, 10 millions de tonnes de déchets du second œuvre sont produits par le bâtiment par an, et selon les experts, 80 % des déchets de second œuvre issus de la démolition ou de la réhabilitation pourraient avoir une seconde vie… Or seuls 35 % sont réellement valorisés. L’objectif d’un taux de valorisation de 70 % en 2020 est ainsi loin d’avoir été atteint.
Afin de relancer la dynamique, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire de 2020, vise à positionner le réemploi comme mode prioritaire de valorisation des produits et matériaux issus de chantiers de déconstruction ou réhabilitation. Par ailleurs, depuis plusieurs années, une filière tente de se structurer autour de différents maillons d’intervention allant de la maîtrise d’ouvrage au réemploi effectif. Ainsi, avant de pouvoir être effectivement réemployés ou réutilisés, les matériaux et produits issus de chantiers de démolition ou de réhabilitation doivent passer par deux étapes essentielles : leur identification en tant que matériaux réemployables, et leur dépose fine, soigneuses, lors d’une déconstruction sélective.
Hiérarchie des modes de valorisation en France
Les évolutions réglementaires récentes laissent à penser que les métiers du diagnostic et de la déconstruction vont être amenés à adapter leurs compétences pour intégrer davantage le potentiel de réemploi sur chaque chantier. En effet, l’arrivée prochaine du nouveau diagnostic Produits-Matériaux-Déchets (PMD), à réaliser obligatoirement pour certains types de bâtiment à déconstruire, implique des compétences reconnues de la part des futurs diagnostiqueurs. Par ailleurs, les pouvoirs publics incitent les maîtres d’ouvrages publics à intégrer davantage de clauses de réemploi dans leurs marchés d’où la nécessité pour les entreprises de déconstruction de proposer des interventions adaptées à des déposes soigneuses en vue de réemploi avec des professionnels sensibilisés à ces nouvelles pratiques.
Diagnostiquer avant de déconstruire : un besoin de compétences reconnues pour une activité remise en cause
L’actuel diagnostic déchets avant démolition, qui va laisser sa place au diagnostic Produits-Matériaux-Déchets dès l’été 2021, n’a pas réussi à faire ses preuves et a dû affronter de nombreuses critiques : seuls 5% à 10% des diagnostics obligatoires sont réalisés, leur qualité a souvent été jugée insatisfaisante, et il est reproché le manque de compétences d’une partie des diagnostiqueurs en matière de prévention et de gestion des déchets.
Evoluant en termes de périmètre et de contenu, le nouveau diagnostic vient également poser des exigences vis-à-vis des compétences détenues par les professionnels réalisant cette prestation.
Ainsi le diagnostiqueur va devoir fournir la preuve, avant la réalisation du diagnostic, de ses compétences « dans le domaine des techniques du bâtiment, de l’économie de la construction et de la gestion des déchets du bâtiment ».
Diagnostiqueur PMD : trois preuves de compétences, au choix, vont devoir être apportées
Selon des experts en matière de réemploi, plusieurs profils de professionnels vont pouvoir s’orienter vers le diagnostic PMD :
- technicien d’études du bâtiment
- ingénieur environnement
- économiste de la construction
- ingénieur du bâtiment
- diagnostiqueur amiante (avec mention) et diagnostiqueur plomb
Déconstruire en vue de réemployer : des pratiques à adapter mais des compétences déjà à l’œuvre
Les entreprises de déconstruction disposent pour la plupart des compétences pour réaliser une dépose soignée de matériaux et produits destinés à être réemployés. Il leur arrive d’ailleurs ponctuellement de répondre à des demandes de maîtres d’ouvrage désirant récupérer tel ou tel élément pour le réutiliser et dans ces cas le déconstructeur adapte sa manière de faire pour préserver les qualités du produit. En effet, plus qu’un besoin de compétences, la dépose en vue de réemploi réclame une adaptation du process et des pratiques d’intervention car ce type d’opération nécessite du temps et de la précision.
A l’heure actuelle, peu de marchés intègrent des clauses de réemploi, et les entreprises de déconstruction restent sceptiques quant au déploiement de démarches de réemploi. Néanmoins, le secteur se déclare prêt à assurer cette prestation dès que les conditions de délais et de coût seront prises en compte par le maître d’ouvrage, car déposer soigneusement pour permettre le réemploi nécessite plus de temps d’intervention et donc un coût de main-d’œuvre plus élevé.
Les entreprises disposent des compétences en interne pour assurer des déposes dites « simples », sans technicité particulière : leurs connaissances et savoir-faire de base sur les grands métiers du bâtiment sont tout à fait adaptés à ce type de dépose. Pour les déposes techniques, pointues, le recours à des artisans spécialisés est requis.
Afin d’adapter au mieux leurs interventions lorsqu’il s’agit d’une démarche de réemploi, les professionnels des entreprises de déconstruction vont avoir besoin d’être sensibilisés sur :
- les procédures d’intervention ou process pour assurer une dépose adéquate
- les précautions à prendre pour la manipulation
- l’acte de dépose en lui-même en fonction du matériau ou produit concerné
- le conditionnement selon le matériau ou bien concerné.
La plupart des acteurs refusent de parler de nouveau métier en la matière : l’intervention de dépose en vue de réemploi implique une évolution des métiers de la déconstruction et non la création d’un nouveau métier. Les compétences sont là et vont devoir s’adapter à de nouvelles pratiques et manières de faire.
Diagnostiqueur et préparateur en déconstruction : deux métiers reconnus en particulière évolution
Fin décembre 2020, France compétences a rendu public la liste des 20 métiers émergents ou en particulière évolution pour 2021. A l’origine de cette liste se trouve le lancement en juillet 2020 d’un appel à manifestation d’intérêt à destination des branches et syndicats professionnels.
Les certifications correspondantes aux métiers de la liste – dont les métiers de diagnostiqueur en produits-matériaux-déchets issus des bâtiments et de préparateur en déconstruction font partie - bénéficieront d’une procédure d’enregistrement simplifiée afin de s’adapter au mieux aux évolutions du monde du travail.
Ainsi, deux certifications, en cours de construction autour de ces deux métiers, devraient bénéficier d’un enregistrement prochain au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) :
- le travail autour des référentiels est en cours concernant la certification liée au métier de diagnostiqueur : structuré autour des métiers du bâtiment et du recyclage le projet de référentiel s’organise pour le moment autour de sept modules et 20 jours de formation, et devraient s’adresser à une population de techniciens à ingénieurs. Ce projet est porté par la fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec) et le syndicat des entreprises de déconstruction, dépollution et recyclage (SEDDRe).
- le CQP Préparateur en déconstruction constitue une refonte de l’ancien CQP Préparateur en démolition : estimée entre 300 et 400 heures, cette formation prévoit dans son référentiel un module spécifique destiné au curage (intervention consistant à démonter et déposer tout le second œuvre d’un bâtiment pour ne laisser que la structure à démolir), et devrait s’adresser aussi bien aux débutants qu’à des professionnels en poste.
Une filière confrontée à des enjeux majeurs
En conclusion, l’étude menée permet de constater que, concernant les maillons de diagnostic et de déconstruction, la filière du réemploi des matériaux de construction va être confrontée à au moins quatre enjeux majeurs dans un avenir proche :
- la formation et l’accompagnement des maîtres d’ouvrage pour qu’ils proposent des marchés intégrant intelligemment des clauses de réemploi
- la réalisation effective de diagnostics PMD fiables et précis sur lesquels les maîtrises d’ouvrage s’appuieront réellement pour définir leur demande en matière de réemploi
- la sensibilisation et l’information des dirigeants (et l’encadrement) des entreprises de déconstruction sur le réemploi et ce que cela implique pour le secteur (adaptation des pratiques notamment)
- l’accompagnement des entreprises de déconstruction dans la professionnalisation de leurs équipes.
Hélène Rammant
(Carif-Oref de Normandie)
A noter :
L'étude du Carif-Oref de Normandie s’inscrit en complémentarité d’une étude-diagnostic sur les « Activités et compétences dans la filière du réemploi des matériaux de construction » menée par la Maison de l'emploi et de la formation (Mef) du Cotentin (lauréat de l’appel à manifestation d’intérêt 2019 pour une économie circulaire en Normandie). Objectif : développer une démarche prospective au niveau régional, pour ancrer et favoriser l'efficacité des démarches de réemploi en diagnostiquant des besoins et en analysant les compétences mises en oeuvre dans la chaîne de valeur qui caractérise cette activité.